“Serenity Despite The Storm est l'album le plus réaliste que j'ai entendu à propos des émotions versus le confinement global”
1 Manyfold Quiet Trances (remix) 11:41
2 Alluvium 4:32
3 Serenity Despite The Storm 9:48
4 The Wise And The Reflecting Lake 9:55
5 Walking Again 5:57
6 Link To Mountain 3:57
(DDL 45:52)
(Tribal ambient, Berlin School)
La voix est douce. Fredonnant sur les résidus des cloches de l'ouverture de Manyfold Quiet Trances (remix), elle nous envoûte avec ses bruissements de nymphes des bois qu'une guitare acoustique tente de saisir au vol. Les héhéhé, fredonnements et chuchotements dépossèdent les instruments acoustiques et les percussions Gamelan de leurs auras musicaux, emprisonnant les ambiances dans un intense moment d'ensorcèlement que l'on remarque à peine la toile d'intensité qui se créée tout autour de cette chorale sibylline. Obnubilé par cette voix, on oublie que le non-rythme initial se transforme subtilement en un rock acoustique où les trésors auditifs des percussions païennes enflamment une ligne de basse entraînante. Plus je découvre la musique de Anantakara, plus le pouvoir de séduction que Philippe Wauman tisse à l'intérieur de ses instruments trouve preneur auprès de mes émotions. SERENITY DESPITE THE STORM est un autre album qui s'inspire des derniers évènements sur Terre. L'emprise du confinement vu à travers les émotions de Anantakara sont plus tangibles lorsque rendue par des instruments acoustiques. Et c'est avec un habile mélange acoustique/électronique que la peur versus le calme et la tristesse opposée à la joie retrouve ses repères. D'où le titre, SERENITY DESPITE THE STORM.
Si Manyfold Quiet Trances est un remix d'un titre composé en en 2011, c'est par un pur hasard qu'il se fond à merveille avec les ambiances de Alluvium. Ce titre sans rythme est guidé par des tintements et des murmures rampant d'une basse. L'enveloppe est acoustique, sauf pour des arrangements qui se développent en timide staccato morphique. La pièce-titre puise ses richesses avec ce mélange de percussions et d'accords de guitare acoustique qui vibrent dans les remous tranquilles d'une basse rampant anonymement, alors que les éléments amplifient son mystère. Des accords de clavier sculptent une ritournelle harmonique autour des 3 minutes. Ils deviennent comme des gouttes d'une pluie circulaire où un nuage refuse d'égoutter sa noirceur dans une phase dont l'intensité nait d'orchestrations qui peu à peu libèrent aussi ici des staccatos ambiants et mirifiques. Ils sont les témoins de cette frustration refoulée qui crache de plus en plus ses émotions dans un passage tumultueux rempli de bruissements de pas faisant les cent pas dans un élan d'impuissance. Il y a quelque chose de poignant dans ce titre que Anantakara a imaginé dans une belle capsule vidéo.
Plus on avance dans SERENITY DESPITE THE STORM et plus le côté électrique et électronique de la musique se fait sentir. La basse tend ses cordes avec mélancolie dans l'ouverture de The Wise And The Reflecting Lake. La guitare tisse un univers enchanteur en faisant tirailler ses accords avec les vrombissements d’une basse stoïque. Ce mouvement lent comme une valse ignorée est un canevas minimaliste où se succèdent des lentes lignes de rythmes et d'éphémères mélodies tissées dans la limpidité de l'espoir. C'est un très beau titre que j'imagine autour de feu de camp alors que les tisons incandescents explosent avant de virevolter comme une fausse danse de lucioles ou de feu follets. Tout simplement magique! Walking Again surprend avec son trémolo qui sculpte un improbable Berlin School maculé par ses empreintes résonnantes. Ambiant, ce rythme statique reçoit l'appui d'un tissage de cliquetis percussifs qui nous rappellent que le répertoire de Philippe Wauman respire de ses visions acoustiques. Et ce dernier nous fait sursauter avec l'introduction de Link To Mountain, dont les ambiances et l'effet de lourdeur à l'effort et les cymbales qui sonnent comme de gros halètements décrivent assez bien l'idée derrière le titre.
SERENITY DESPITE THE STORM est l'album le plus réaliste que j'ai entendu à propos des émotions versus le confinement global. Je crois que son côté acoustique y est pour quelque chose, créant ainsi une sensation de promiscuité aussi tangible qui nous attache dès les premiers souffles Manyfold Quiet Trances. J'ai beau creuser, mais je n'y trouve aucun moment mort. Un très bel album que je recommande fortement, même si nous sommes assez loin de la Berlin School. Sauf que les fans de la période Ummagumma de Pink Floyd seront ravis par cet album de Anantakara.
Sylvain Lupari (28/06/20) *****
Disponible chez Anantakara Bandcamp
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