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Writer's pictureSylvain Lupari

ARJEN SCHAT: Manifolds (2020) (FR)

Un album avec tous les attributs pour plaire aux amateurs de structures longues aux lentes évolutions de la Berlin School

1 Immersion 25:09

2 Eversion 26:10

3 Submersion 24:51

(DDL 76:11)

((New) Berlin School)

Finalement, la MÉ de Arjen Schat traverse du côté de l'Atlantique avec un premier album sur Synphaera Records. MANIFOLDS est le 39ième album du musicien Hollandais, confirmant la mainmise de cette patrie sur le modèle Berlin School avec beaucoup plus de dynamisme. Tant, que j'ai fini par étiqueter le genre, polarisé par des artistes tel que Ron Boots, Gert Emmens et Free System Project, la Netherlands School. Arjen Schat fait partie aussi de cette génération d'artistes qui couchent leurs idées sur un clavier, produisant ainsi une musique à un rythme dépassant une production de un CD par mois. Il y a de bonnes idées, comme il y en a qui sont de trop. Avec ses 3 longues structures plutôt minimalistes dans des formes rotatoires comparables à des réceptacles verticaux où poussent et se greffent une multitude d'accords et d'effets, ainsi que des solos assez timides, et où les parfums de Robert Schroeder peuvent être insérés avec ceux de Software et Tangerine Dream, MANIFOLDS fait parti des bonnes idées de Arjen Schat et des belles découvertes du label américain.

C'est avec une ligne de ronflements, de bourdonnements alliés à des tonalités électronique-cosmiques que Immersion envahit ma salle d'écoute. Cette ligne se détache en se fragmentant en plusieurs filaments qui dès apparus sont enrobés d'une fine texture de réverbérations. Paresseusement, elles dérivent pour suivre des parcours sinueux qui se rejoindre ou s'entrelacer tout près de ce noyau sonore qui tourne comme une toupie en apesanteur sous les chants d'étoiles. Cette ouverture oisive émiette les 5 premières minutes de Immersion qui s'agrippe à une ligne de rythme oscillant avec une certaine vigueur dans un décor qui n'a guère évolué sauf pour son rythme dont les oscillations épousent des mouvements de rodéo qui sautillent avec poésie sur une autre structure oscillante d'un séquenceur. Ces deux alliés rythmiques ajoutent ainsi une profondeur à ce qui se développe comme un bon rock électronique cosmique où des gorges invisibles évacuent toujours le torrent de leurs réverbérations. Les solos de Arjen Schat arrivent autour de la 11ième minute. Musicaux, ils flottent sur cette structure rythmique du séquenceur qui vient d'ajouter sa 3ième ligne avec des ions limpides, comme joués sur un xylophone de verre. Les solos de synthé chantent en plus grand nombre autour de la 13ième minute. Cette structure minimaliste sert bien la cause de Immersion dont l'arrivée en douceur des percussions stimulent sa vitesse rotative alors que les doigts du synthésistes multiplient des solos de synthés coulant comme de la soie musicale entre mes oreilles. Et même si la chaine débarque et que l'impression que le titre déraille, la vitesse accrue lui donnant une allure zigzagante et spasmodique, la musicalité dans les solos et la fusion de tous ses éléments rythmiques nous amène dans un délicieux 5 minutes de magie électronique. J'ai trouvé que nous étions plus près de Indra sur ce titre que des territoires de Klaus Schulze.

C'est sur un lit de réverbérations et les modulations d'une ligne de basse aux ambitions borborygmes que Eversion s'offre à mes oreilles. Vous savez comment j'aime les sons? C'est donc avec d'attrayants effets sonores, sautillant d'une oreilles ou d'un haut-parleur à l'autre, que le rythme giratoire se met à courtiser mon écoute. Des nappes de synthé mollasses ornent l'arrière-scène, alors qu'une ligne du séquenceur délie ses ions qui gambadent furtivement, comme au chat et la souris, alors que toujours les effets sonores bondissent et éclatent dans mes oreilles qui restent avides et grandes ouvertes. Graduellement, Eversion s'habille des noblesses de la MÉ alors que des solos de synthé s'accumulent sur cette structure où le jeu ondulant de la basse est confronté à un rythme saccadé. Ces deux extrêmes s'affrontant sur une ligne horizontale créent le milieu parfait pour que ce deuxième titre de MANIFOLDS se déploie comme Immersion mais avec plus de mordant dans son rythme, bien appuyé par une armée d'arpèges, des cliquetis percussifs et des séquences dans une structure qui porte bien ces influences de Robert Schroeder au niveau des tonalités organiques, incluant cette basse Funk qui roupille et ronronne, ainsi que des solos de synthé ayant la signature particulière du synthésiste Hollandais. Les vents fouettant nos tympans annoncent l'arrivée de Submersion venant du Cosmos. Il y a comme un effet de machine sur un respirateur artificiel alors que ondes et brumes s'intensifient avec des solos aux boucles torsadées gracieuses. Le niveau de musique flirte avec une zone industrielle alors que peu à peu, le séquenceur libère des ions qui ont ce goût de Tangerine Dream dans leur dévotion harmonique. Encore ici, des accords élastiques tentent de créer un climat harmonique dans une introduction remplie de couleurs métalliques. L'impression que j'ai est un peu comme ce noyau dans Immersion où tout ce qui sort se multiplie pour revenir et s'ancrer au noyau sonore et repartir…Enfin, vous voyez le genre. Et tout ce brouhaha réussit à se fusionner en une approche cohérente dans un splendide New Berlin School giratoire rempli de solos de synthé geignards. Et, comme sur les deux premiers titres de MANIFOLDS, Submersion tourne un peu plus vite en emmagasinant des effets percussifs et des percussions qui propulsent légèrement plus ce noyau qui n'a jamais cesser d'aspirer et d'éjecter les sons dans une autre dimension. Un peu comme l'idée derrière ce concept de MANIFOLDS.

Un album ayant tous les attributs pour plaire aux amoureux de longues structures doucement évolutives et de ce Berlin School ramené à des proportions plus mécaniques dans les années Software, MANIFOLDS de Arjen Schat est une très belle carte d'invitation afin de découvrir son univers de presque 40 albums. Pour le label Synphaera Records, il s'agit d'une autre belle prise, après celle de K. Markov, afin de faire découvrir à un plus large public toutes les beautés et subtilités du genre (New) Berlin School.

Sylvain Lupari (25/03/21) *****

Disponible au Synphaera Bandcamp

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