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Writer's pictureSylvain Lupari

Cyclical Dreams: Gemstones III (2022) (FR)

Cet album propose un merveilleux équilibre entre les diverses orientations de la MÉ inspirée du style Berlin School

1 Affection Fragments (Craig Padilla) 8:36

2 The Moon is a Harsh Mistress (BURG)7:24

3 Fahrbahn (Elinch) 7:07

4 Frontiers 4 (Arcane) 7:41

5 Spiralling (Takla Makan) 11:46

6 Toay (Cartas de Japón) 6:22

7 Lands of War (Thom Brennan) 12:00

8 Tribute to KS (The Soviet Space Dog Project) 13:16


9 Tales from Dark Matter (Sophos) 7:11

10 Sacre-Coeur (RoSch) 10:12

11 Lámparas de Mercurio (Francisco Nicosia)10:39

12 In your dimension (Michel Huygen) 4:53

(DDL 107:11)

(Berlin School, experimental, ambient)

Il y a de la sapré belle musique électronique (MÉ) au sillon carré dans cette magnifique compilation du label Cyclical Dreams! Que ce soit du splendide Tribute to KS au très impressionnant schéma rythmique de Takla Makan dans Spiralling, sans oublier l'excellent Frontiers 4 de Arcane; l'aficionado de MÉ en vous sera comblé par ce impressionnant GEMSTONES III. Quant à ceux qui ne connaissent la MÉ que du bouche à oreille, vous avez toutes les raisons de tomber dans la marmite. Fidèle à sa tradition, les patrons du label Argentin ont sélectionné des artistes qu'ils vénèrent et qui ont influencé les orientations du label, ainsi que des artistes qui œuvrent dans l'ombre des grands noms et qui méritent une place bien à eux dans le firmament de la MÉ, sans oublier quelques incontournables noms de ce label qui est maintenant solidement implanté dans l'univers de la MÉ contemporaine.

C'est Craig Padilla qui a l'honneur d'ouvrir cette 3ième édition de Gemstones. Affection Fragments est un titre atmosphérique avec des arpèges qui font tinter et bondir leur délicatesse moirée sur une texture qui ronronne en arrière-fond. Ça donne une belle mélodie circulaire qui flotte en suspension et dont les chétifs accords tremblotant empruntent le chemin d'un crescendo émotif autour de la 4ième minute. Dès lors, la musique devient plus intense avec des accords de clavier qui tombent plus lourdement. Un rythme ascensionnel se dessine peu après avec une séquence qui sautille avec un effet zigzagant et des battements errant sur une structure qui doucement retourne à l'état de quiétude harmonique de son ouverture. Je ne connaissais pas du tout BURG, un nom de plume pour le musicien suédois Jouni Ollila, et son titre The Moon is a Harsh Mistress m'a ouvert la porte à un univers à découvrir. D'ailleurs je vous recommande fortement de visualiser son titre Solace sur You Tube. Voici le lien; Solace. J'ai aussi entendu des extraits de son album, Incremental Institution, sur Bandcamp. The Moon is a Harsh Mistress est assez représentatif de son univers, construit principalement autour de synthés analogues, avec une structure plus ou moins gothique qui se développe à travers une suite de battements plus ou moins rythmés. Le clavier y dépose une délicate mélodie dont les arpèges givrés tintent sur cette structure qui devient animée de soubresauts. Ces sursauts ont une texture industrielle qui résonne dans une enveloppe électronique dominée par de bons solos de synthé. Le titre suit cette évolution minimaliste tout en insérant plus de résonnance industrielle et des effets percussifs qui donnent plus de noblesse à une structure dont le séquenceur rappelle un certain Chris Franke. À découvrir! Elinch est aussi un nouveau nom pour moi. On peut aussi voir les prouesses de cet artiste Allemand qui est un adepte des synthés analogues sur You Tube. Son dernier album, Diaries, est offert sur le base de payer ce que vous voulez sur Bandcamp. Je l'ai téléchargé 😊!Fahrbahn est un titre plus expérimental qu'il faut prendre le temps d'écouter. C'est un titre atmosphérique noué sur l'intensité des boucles de synthé répétitives qui virevoltent sur un linceul de résonnances ténébreuses. Il est à sa place derrière The Moon is a Harsh Mistress et ce court volet de MÉ plus expérimentale de GEMSTONES III. Frontiers 4 de Arcane n'a pas vraiment besoin de présentation, j'en ai fait la chronique que vous pouvez lire ici. C'est du pur Tangerine Dream au royaume de leur musique de films des années 80. Ça fait longtemps que j'entends parler de l'artiste Anglais Takla Makan, de son vrai nom Tony Allgood. Mais je n'ai jamais eu la chance d'entendre sa musique. Cyclical Dreams me tend cette occasion que j'ai saisie avidement avec la frivole structure harmonieuse de Spiralling. Disons que les arpèges en verre ne mettent pas de temps à se mettre au diapason du titre avec un beau tourbillon mélodieux qu'une ligne de basses-séquences harponnent dans une structure sautillante qui n'est pas sans rappeler du Tangerine Dream, notamment dans les intonations de ce rythme sautillant. Les arpèges prennent une autre tangente plus rythmique que mélodique, chassant momentanément la première ligne d'harmonie de ce titre qui se dénouera avec quelques changements de peaux, rythmiques comme harmoniques, tout au long de ses presque 12 minutes. C'est le genre de titre évolutif qui demande quelques écoutes, mais c'est très bon. C'est une nouvelle perspective dans l'art de puiser ses influences dans la musique du Dream.

Cartas de Japón est égal à lui-même, soit une MÉ raffinée et légèrement complexe, avec Toay. J'adore son ouverture tribale avec ces percussions qui résonnent sous un vent d'un synthé apocalyptique. Le jeu des percussions est entraînant alors que les ambiances se dorent dans un univers sibyllin. La progression du rythme, qui est essentiellement la base de Toay, se transforme comme un joyau pour ceux qui demandent plus de raffinement pour les percussions électroniques. Je connais Thom Brennan pour avoir entendu son album Mountains à la fin des années 80. Et c'est avec plaisir que je renoue avec sa musique qui est plus centrée sur les atmosphères dépeignant les panoramas de côtes Est et Ouest américaines. Lands of War est assez représentatif de son style avec des pulsations vibratoires et des battements sourds qui servent de lit à des turbulences atmosphériques. Le musicien-synthésiste américain multiplie les boucles et les effets de réverbérations qui ont cette capacité d'accentuer la force d'un rythme stationnaire. Intense est l'adjectif idéal pour dépeindre les ambiances de Lands of War. Je ne tricoterais pas trop longtemps autour de Tribute to KS qui est une très belle ritournelle électronique de The Soviet Space Dog Project. Lumineuse avec ces arpèges cernés de verre, c'est une mélodie céleste du genre de Crystal Lake qui serpente nos émotions avec un peu plus de vigueur. Une superbe pièce de MÉ! Je viens tout juste de chroniquer le dernier album de Sophos, MUEON que j'ai trouvé très bon d'ailleurs. Et Tales from Dark Matter s'inscrit dans la lignée de cet album avec une première structure de rythme pulsatoire dont les battements aléatoires structurent un long corridor rythmique zigzagant. Le reflet d'une couche de brume acrylique flotte autour de cet impétueux mouvement de rythme qui trouve écho avec une vision plus éthérée, plus harmonieuse d'une structure en parallèle. Monte et descend, le rythme suit son inlassable route en regroupant différentes tonalités qui lui donnent un lustre musical plus séraphique. Quand la complexité s'amourache de son paradoxe! RoSch? C'est un nouveau projet de Frank Rothe et Mario Schönwälder qui donnent ici dans une musique d'ambiances plus ténébreuses. Cerné par une chorale de moines gothiques et par des ondes de synthé sibyllines, Sacre-Cœur est une lente procession qui fait beaucoup pensée aux sombres phases atmosphériques de Filter-Kaffee 104. Initialement bousculée par des percussions éparses, la musique évolue en mode méditatif avec des belles odes flutées dans son milieu pour se conclure avec une délicate séquence de rythme ambiant. Ça surprend de ce duo qui nous incite à boire du Filter-Kaffee. Titre atmosphérique intense et bousculé par d'éphémères explosions de rythmes et de mélodies rythmiques, Lámparas de Mercurio explique aisément pourquoi la MÉ est aussi séduisante. Et si on me demandait de trouver un titre qui dépeint le passage de l'automne à l'hiver observé d'un promontoire, je choisirais sans doute ce titre dont la structure rythmique est dictée par un croisement de vives oscillations qui serpentent les discrètes ondulations d'une ligne de basses séquences. Les oscillations maintiennent un beau niveau mélodique où se greffent des vents sifflotant un air spectral. Des arpèges virevoltant comme des flocons de neige dans un vent en forme de spirale se détache des oscillations, créant un tourbillon harmonique qui est en symbiose avec les 3 premiers éléments qui secouent les prémices de ce très beau titre de Francisco Nicosia. D'autres accords totalement déconnecté du contexte tombent aussi, créant une douce cacophonie qui ajoute une nouvelle dimension harmonieuses à ce titre qui est à dévorer par les oreilles! In your Dimension est un très beau titre que Michel Huygen dédie à un ami de longue date Tomás C.Gilsanz. Ce second père pour le musicien espagnol était non seulement son grand confident mais aussi cet artiste dont les tableaux ornaient les pochettes des premiers albums de Neuronium, tel que Chromium Echos, The Visitor et Heritage pour ne nommer que ceux-là. C'est un titre très mélancolique performé par un synthé déguisé en guitare acoustique dont les accords pincés avec peine résonnent sur un linceul de voix affligées.

Entre audace et une zone de confort bien établie, entre complexité et la légèreté d'une musique électronique (MÉ) plus accessible, GEMSTONES III ratisse large et propose un merveilleux équilibre entre les diverses orientations de la MÉ inspirée par la Berlin School. Il y a de la très belle musique dans cette compilation de titres, pour la plupart, inédits qui trouvent toujours le moyen de jouer avec nos émotions, nous procurant un gros 107 minutes d'une musique qui s'écoute et se découvre mieux que s'explique…même avec le plus large des vocabulaires. Messieurs de Cyclical Dreams, vous êtes très impressionnants!

Sylvain Lupari (15/09/22) ****¾*

Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp

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