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  • Writer's pictureSylvain Lupari

GUSTAVO JOBIM: Meio-Dia (2017) (FR)

“Bien que baignant dans des moments très complexes et difficiles à apprivoiser, Meio-Dia est probablement l'un des meilleurs albums de 2017”

1 Meio-Dia 22:02 2 Pirâmide 15:32 3 Eterno Retorno 7:17

(DDL 44:51) (Krautrock, Berlin School, Experimental) Gustavo Jobim est tout un phénomène! Fan fini des structures de rythmes motoriques de la Düsseldorf School, le multi instrumentaliste du Brésil a graduellement gravi les marches de la crédibilité artistique en attaquant un genre musical pas vraiment accessible. Un genre qui fait pourtant un fascinant et tangible lien entre le Krautrock des années vintages à un Krautrock plus contemporain, tout en injectant les parfums du vieux Ashra et Tangerine Dream des années Pink. On peut toujours être intimidé par son style, mais à chaque fois que l'on dompte un de ses albums on reconnaît toute l'étendue de sa créativité. MEIO-DIA est déjà un 19ième album pour cet artiste éclectique. Et c'est tout un album! Un album surprenant puisque l'on glisse facilement dans des sphères qui nous sont connues avec 2 titres phares qui évoluent entre des schémas aussi étonnants et toujours complexes, mais à la toute fin assez séduisants. Des éléments percussifs dansent avec le rythme d'un pic bois un peu gelé en ouverture de la longue pièce-titre. Des accords, jouant un peu au chat et à la souris, épousent ce modèle de rythme qui fait plutôt EDM une fois que des nappes de synthés lancent de beaux refrains et solos qui se poussent dans une phase d'improvisation. Le rythme se casse d'une façon impromptue dès la 3ième minute. Seules restent ces castagnettes de bois qui sautillent dans des chants de Mellotron. Des arpèges sautillants redéfinissent alors des nouvelles frontières. Et si le rythme semble similaire, le décor change avec l'ajout de nappes rugueuses qui râlent dans un micmac d'effets et d'harmonies où le Mellotron valse maintenant avec un jet d’accords qui pétrifient une structure zigzagante que l'on entend à peine dans un décor riche en tons et en effets. Des riffs de claviers dansent au même diapason des nappes de Mellotron, qui ont ici un léger soupçon d'orgue, démontrant toute la profondeur d'un titre qui s'enracine dans sa structure minimaliste plutôt saccadée, mais qui coule tout de même assez bien. Vous aimez les sons? Un carrefour de sons qui sont indépendants l'un des autres mais qui respirent dans le même corridor? Les 8 premières minutes de Meio-Dia vont vous séduire, après en avoir apprivoisé toute la dimension sonore. Par la suite, la musique se dirige vers une phase d'ambiances chthoniennes avec de délicieuses nappes d'orgue dont les harmonies flottantes errent comme des spectres égarés tout en imitant la structure de rythme initiale avec de lentes impulsions. Un peu plus de 4 minutes plus loin, ces ambiances se fondent vers un rythme plus enlevant. Un rythme où les séquences dansent comme une réunion de petits diablotins sur un air de folklore traditionnelle. Gustavo Jobim tisse de superbes solos de synthé alors que Meio-Dia s'enfonce dans une finale lourde de ces ambiances sculptées par un Mellotron en mode Suspiria de Goblin. Après ce superbe titre, Pirâmide nous amène dans les territoires oubliés du Krautrock et des premiers albums de Kraftwerk dans une structure où les parfums de Ralf And Florian embrasent le squelette affamé d'Autobhan. Le rythme, les ambiances et les harmonies! Tout est vertigineux dans cette ouverture très multi-couleurs et pluri-tonales. Le mouvement dérape vers une phase très bariolée où les tons communiquent avec un langage aussi complexe que ces sons qui pullulent dans les jeux vidéo. Cette phase d'ambiances s'achemine vers la 3ième partie de Pirâmide. Ici l'Autobhan est bariolé d'une muraille de tonalités stridentes qui crissent dans une folie éternelle. Si le rythme reste entraînant, les ambiances et les harmonies cacophoniques qui hurlent une vision tout simplement abstraite donneront quelques maux de têtes à ceux qui veulent résister. Nous sommes un peu beaucoup dans l'extrême de Gustavo Jobim. Dans une musique plus abstraite, voire concrète, où l'on palpe cette grande admiration de Gustavo pour Conrad Schnitzler dont l'approche anti commerciale, quasiment anti musique, est fortement ancrée sur ce titre. À tout le moins, dans sa dernière phase. Mais il y a beaucoup d'éléments de Berlin School rétro sur Pirâmide que l'on découvre avec étonnement après quelques écoutes. C'est un peu moins pire, mais toujours assez intimidant, avec le rythme très Richard Pinhas (période L'Éthique) qui atterrit entre nos oreilles dans la piste suivante. Eterno Retorno est très à l'image de son titre avec sa structure qui évolue par un mouvement de séquences ascendantes dont les boucles épousent la même ritournelle, tant rythmique qu'harmonique, alors que les ambiances et mélodies secondaires sont à mi-chemin entre le plus accessible et le plus inaccessible de Pirâmide.

Pas pour toutes les oreilles, quoique toutes devraient oser l'expérience, MEIO-DIA est une audacieuse boîte à musique qui reste d'une accessibilité sans égal dans le répertoire de Gustavo Jobim. La pièce-titre démontre tout le génie d’un musicien qui teste ses machines dans des territoires que peu d'artistes osent s'aventurer. Et le résultat est aussi déroutant que délirant! Mis à part l'infernale finale de Pirâmide, les quelques 40 autres minutes de cet album sont dans le domaine d’une MÉ expérimentale plutôt accessible qui saura séduire les oreilles les moins timides. Audacieux et musical, les 2 extrêmes cohabitent sans superficialité dans ce fascinant album qui relève tous le défis pour se tailler une place de choix parmi les plus beaux albums de MÉ expérimentale et sans frontières en 2017.

Sylvain Lupari (10/01/18) ****½*

Disponible au Gustavo Jobim Bandcamp

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