“Roach & Stearns surpasse les attentes en livrant un album qui dépasse mes expectatives les plus audacieuses”
1 Horizon is Home 13:04
2 The Long Road 11:24
3 Impelled 11:48
4 Cloud of New Promise 7:04
5 Primal Return 7:38
6 Embracing the Infinite 8:39
7 Parable of Understanding 11:37
(CD/DDL 71:14)
(Tribal Ambient Electronic Folk)
Décidemment, Michael Stearns est sur toutes les lèvres des fidèles qui suivent la musique électronique contemporaine. Un solide album avec Erik Wollo en 2020, Convergence, une apparition au dernier SoundQuest Fest 2021 et finalement un album collaboration avec l'unique Steve Roach. Honnêtement, je m'attendais à quelque chose de gros, comme j'appréhendais un léger désappointement comme c'est souvent le cas lorsque deux génies se rencontrent. Mais rien de tel ici! J'en ai profité aussi pour écouter Kiva, la dernière collaboration entre ces deux magnifiques musiciens. Cet album exploitait de bons effets de percussions et de percussions, tribales comme électronique, de grosses ambiances amérindiennes, ainsi que d'intenses passages atmosphériques. On retrouve ces ingrédients sur BEYOND EARTH & SKY, mais dans de justes proportions et assez nuancés pour que le terme intensité retrouve un peu plus de sa noblesse. Attaché bien vos oreilles à vos écouteurs, quoique la production est de taille pour affronter les espaces de ma salle d'écoute, puisque les deux musiciens américains nous ont concocté un petit chef-d’œuvre où nous avons plus les mêmes visions des déserts de l'Ouest américain.
C'est avec une lumière sonore que l'horizon se lève chez Steve Roach et Michael Stearns. Douce et chaleureuse, des violons et violoncelles stimulent son ascension. C'est dans cette ouverture secrète que Horizon is Home continue d'amplifier sa structure musicale. Une ligne de basse vampirique solidifie une structure ambiante dont l'intensité pastorale étire son dernier rayonnement jusqu'à ce qu'un superbe rythme tribal accapare nos oreilles. Percussions tribales, effets percussifs et caisson grave sculptent un rythme ancestral amérindien qui vit sous un ciel éclairé de graffitis sonores de synthés qui opposent leurs visions. Un piano infiltre ce mouvement lent et lourd de passion après la 6ième minute. Devenu plus un folk électronique que de l'ambiant tribal, Horizon is Home regorge d'une divine musicalité qui emprisonne notre attention sur un envoûtant canevas rythmique. Les lentes agonie du violoncelle arrache ces soupirs à l'âme que le piano libère de sa discrète présence. La texture organique des battements est unique en soit et est à l'origine de The Long Road dont les battements éparses et les tintements de clochettes/bouteilles laissent une fine brume de résonnance sur son introduction. Le rythme qui s'en extirpe est plus lent et lorsqu'un accord tombe avec fracas, c'est pour exciter cette onde shamanique qui murmure à travers un didgederoo. Dès cet instant, la texture rythmique du titre éclate avec une panoplie d'effets percussifs. Les trompettes africaines tentent bien que mal de donner un second souffle à The Long Road qui reste ancré dans les attraits de ses éléments percussifs sous un ciel bourdonnant de fièvre musicale. La seconde partie propose une phase plus méditative qui va en croissant jusqu'à coiffer sa finale. On arrive à Impelled et non, la route des rythmes n'est pas encore terminée! Son ouverture croisse en intensité à partir de grondements percussifs et d'ondes sonores d'un bleu tranchant. Et ce tissu se fragmente comme on fragmente une particule qui se regénère en une forme plus saccadée…comme un train roulant vers l'ouest américain. Construit sur un fascinant maillage de percussions tribales, de basse-pulsations et de séquences, ce rythme est frénétique et effréné. Évidemment des éléments prismatiques se collent à cette envolée pour le moins surprenante du tandem Roach & Stearns. D'ailleurs nous sommes plus en mesure d'entendre la texture de ce rythme lorsqu'il ralenti pour rencontrer un autre train qui le croise autour de la 5ième minute. Cette rencontre a lieu sous un ciel d'une intensité remplie de nappes d'un orgue pastoral. L'écho de ce train et les miettes réverbérantes meublent les ambiances d'un stratagème percussif qui nous a cloué sur notre fauteuil alors que respire une faune organique jusqu'à la finale de Impelled.
Une guitare dépose ses notes sur une brume audacieuse en ouverture de Cloud of New Promise. La montée de cette dense brume ainsi que ses lents déplacements nous ramène à cette merveilleuse période de Western Spaces. Après ce très beau moment ambiant et méditatif, Primal Return décide d'y rester et d'exploiter ces rythmes shamaniques de l'époque, avec la technologie d'aujourd'hui. Les premiers jets du synthé sont d'un bleu azuré qui se transforme en bourdonnements à mesure que le rythme ambiant et envoûtant installe sa base. Un rythme ténébreux qui bat sous un ciel obscur rempli de souffles éteints et de murmures de didgeridoo qui épousent les courbes des drones flottant dans les noirceurs. Le rythme tribal est menacé par de sourdes incantations alors que des riffs de clavier tombent, créant des tisons d'un bleu ardent dans une obscurité lézardée par un synthé qui lance des filaments de nuits apocalyptiques tout en dressant une muraille de voix où chevrotent celles des plus âgés. Un peu plus et c'est moi qui a bu cette potion shamanique amérindienne où je vole comme un aigle dans l'obscurité. Un voyage qui franchit le cap des 6 minutes où par la suite, Primal Return flotte sur les ailes du silence. Intense et captivant lorsque joué à l'air libre, sans écouteurs. À mon humble avis, Embracing the Infinite est le plus beau titre de BEYOND EARTH & SKY. Pourtant, son enveloppe est drapée d'une brume dense et ténébreuse. Et c'est sous elle que des accords opalescents ont décidé de sculpter une incroyable mélodie spectral à donner la chair de poule. C'est comme entendre un passage mélodieux de M'Ocean, mais joué à l'envers. À classer aussi dans Structures from Silence. L'introduction de Parable of Understanding est autant poussé par les vents des déserts de l'Ouest américain que la finale de Embracing the Infinite. Une ouverture sereine où les flûtes compétitionnent avec les vents azurés qui font légèrement tinter divers carillons. Une nappe de synthé injecte une dose d'intensité à ce mouvement ambiant quelques 30 secondes après sa 4ième minute, donnant un effet de luminosité qui se traduit par la lente arrivée d'une autre nappe qui éveille une tonnerre de percussions 2 minutes plus loin. Ce grondement atmosphérique sévit pour à peine 60 secondes avant que la tranquillité du désert et de ces chants lancés par des vents contournant ou perçant cactus et rochers ne revienne hanter les derniers moments d'un album qui scelle les retrouvailles de 2 pionniers de la Pacific School.
Grandiose! Steve Roach et Michael Stearns surpassent les attentes en livrant un album qui dépasse mes expectatives les plus audacieuses. BEYOND EARTH & SKY est un superbe album sans failles qui fait la juste part entre l'ambiant, le tribal ambiant, le folk électronique et les rythmes frénétiques. En aucun moment sur ce splendide parcourt de 71 minutes, nous sentons les deux musiciens manquent de souffle ou d'inspiration. Tout est parfaitement balancé pour le plaisir de nos émotions et de nos attentes qui ne s'anticipaient juste pas à un album aussi grandiose.
Sylvain Lupari (02/11/21) *****
Disponible chez Projekt Records Bandcamp
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