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Writer's pictureSylvain Lupari

ULRICH SCHNAUSS: A Long Way To Fall (2012) (FR)

“Étonnant mais brillant, A Long Way To Fall est un beau gros gâteau de sons iconoclastes assis sur des rythmes sauvages et des mélodies efficaces”

1 Her and the Sea 5:07 2 Broken Homes 7:35 3 Like a Ghost in your Own Life 5:49 4 A Long Way to Fall 6:07 5 I Take Comfort in your Ignorance 5:58 6 A Forgotten Birthday 7:02 7 The Weight of Darkening Skies 5:25 8 Borrowed Time 4:51 9 Ten Years 6:06 10 A Ritual in Time and Death 7:20 Ulrich Schnauss Music

(CD 61:21) (Electronica, E-Rock & Shoegaze)

Avant de joindre l'édition des Quantum Years de Tangerine Dream, Ulrich Schnauss connaissait une carrière bien florissante. En plus de faire partie du groupe de rock électronique anglais Engineers, avec Mark Peters, ou encore du duo Allemand Beroshima, avec Frank Müller, le dernier membre de l'aventure Tangerine Dream était une figure bien connue dans l'industrie de la musique électronique de par ses collaborations avec des artistes aussi prestigieux que Johannes Schmoelling, Lunz (Roedelius) ou encore M83 pour ne nommer que ceux-ci. Parallèlement à tous ces groupes et ces collaborations, Ulrich Schnauss a développé une intéressante carrière solo qui fut lancée avec l'album Far Away Trains Passing By. Entre cet album, paru en 2001, et Far Away Trains Passing By, que j'ai chroniqué dernièrement, Ulrich Schnauss proposait 3 albums solo qui ont charmé une génération d'adeptes des styles down-tempo, Dark Ambient, Électronica et d'un genre plutôt inaccoutumé; le Shoegaze. Une forme de rock éthéré et bruyant qui se concentre habituellement sur des paroles inintelligibles et déprimantes ainsi que des distorsions de guitares. Un genre très différent des premiers albums d'Ulrich Schnauss mais qui conserve néanmoins un petit cachet mélodique. Un genre qui a divisé ses fans dans l'album A LONG WAY TO FALL qui s'en nourrit mais pas au point d'être incomestible. Bien le contraire! La musique est très bonne et respire d'une audace très particulière alors que les effets des voix, sauf pour Broken Homes, ne sont pas vraiment dérangeantes.

Her and the Sea débute avec une approche ombragée par un dense brouillard sonique. On y entend bien des voix, sauf que le cachet spectral est très attirant. Lorsque la musique se met en branle, elle déploie un beau filament stroboscopique où naît une superbe faune percussive. Les voix deviennent une chorale incomprise qui intervient avec un attrait plus mélodieux cette fois-ci. Sans direction rythmique précise, la musique de Her and the Sea surprend constamment l'oreille avec des directions inattendues où rôdent toujours le côté très harmonique d'Ulrich Schnauss. C'est le genre de titre, surtout pour les percussions, que l'on aime assez facilement. Ces percussions gondolent la structure plutôt éthérée de Broken Homes qui délibère entre ses phases d'ambiances et ses dérapages rythmiques aussi nébuleux que désordonnés. Ici, la chorale respire celle d’un monastère en décrépitude et je dois admettre que les voix à la toute fin brisent un peu le charme. Like a Ghost in your Own Life est un petit bijou. Une belle ballade du style Jerome Froese avec de belles variances dans une structure mélodieuse hyper accrocheuse. On accroche à ce titre, comme au plus techno A Forgotten Birthday très facilement. Pour le reste, je compare A LONG WAY TO FALL à Heroes de David Bowie tant l'enveloppe musicale et les ambiances qui cernent des rythmes toujours entraînants étonnent autant que séduisent et qu'au final on en devient addicte. Prenons la pièce-titre et son ouverture rythmique hachuré par une série de riffs sans cordes qui inventent un battement métronomique. Les effets de guitare affluent avec un maillage de voix, comme des nappes de synthé aux parfums Tangerine Dream. Tranquille mais enterré sous une avalanche d'effets, A Long Way to Fall s'extirpe des emprises des ambiances afin d'offrir une cadence plus inspirée qui démontre son ossature primaire aussi ténue qu'un tic-tac. Les voix sont plus harmonieuses vers la finale.

I Take Comfort in your Ignorance est un titre béton! Son rythme bat sur des percussions plus sobres que cette ligne de basse qui nous secoue le trémolo. Les effets de synthé sont divins, de même que cette délicate mélodie qui en vit. Ce rock lourd et très entraînant se bute à une phase d'ambiances avant de régurgiter une fureur très radioactive. Plus j'écoute et plus je trouve ça génial. The Weight of Darkening Skies est construit sur les mêmes principes, mais dans un univers différent. Ici la structure de rythme ondule avant de se faire harponner par des percussions, une basse et un clavier tout aussi vorace que dans les dernières minutes de I Take Comfort in your Ignorance. Pour moi, il s'agit d'un intermède dans la fureur chronologique de A LONG WAY TO FALL, car Borrowed Time nous pète dans les oreilles avec sa structure aussi alambiquée qu'une culture vers de terre qui cherche de la boue! Génial dans sa distorsion des sons et du rythme! Idem pour Ten Years et sa lourdeur insensée qui laisse filer de beaux filets d'harmonies usées par tant de férocité. Un titre très difficile à ingérer mais qui vaut la peine. Et je dirais la même chose de A Ritual In Time And Death, surtout pour sa finale qui écrabouille les échantillonnages de voix à la Jean-Michel Jarre dans The Magnetic Fields. Mais juste avant cette odyssée vers les néants, ce titre offre une époustouflante structure de rythme vive et saccadée dans un style où l'Électronica manque de souffle.

Inhomogène et complexe, A LONG WAY TO FALL est une sacrée galette de sons iconoclastes où le désordre des rythmes appartient à une poignée d'irrésistibles qui se nourrissent de l'incompréhension des autres. Mais je vous garantis qu'une fois bien assimilé, ce fascinant album d'Ulrich Schnauss meublera vos conversations et vous vous féliciterez de votre obstination à y faire face. Déroutant mais génial!

Sylvain Lupari (20/08/17) ***** SynthSequences.com

Disponible au Ulrich Schnauss Web Shop

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