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  • Writer's pictureSylvain Lupari

SKY BURIAL: There I Saw the Grey Wolf Gaping (2012) (FR)

“Vous est-il arrivé de trouver de fines lignes de beauté à travers un être déformé? Voilà l'histoire de There I Saw the Grey Wolf Gaping”

1 Incantare 10:13 2 Shedding the Husk 10:30 3 Carne[val] 5:17 4 Silence Moves 10:23 5 Beyond the Veldt 5:13 6 Fools Circel 9wys 4:22 7 Bone to Beak (The Vultures Speak) 5:16 8 There I Saw the Grey Wolf Gaping 5:13 Sky Burial Music

(CD/DDL 56:37) (V.F.)

(Dark Ambient)

L'avantage d'écrire des chroniques est de recevoir de la musique qu'ordinairement on ne penserait même pas à écouter. Prenons THERE I SAW the GREY WOLF GAPING de Sky Burial. Une pochette anonyme, comme dans le temps des vinyles, avec un intrigant squelette de tête de loup n'est pas nécessairement le genre de présentation qui tape à l'œil. Pourtant c'est dans ce sobre emballage que se cache ce 9ième album de Sky Burial; un projet musical (sonore?) américain formé en 2006 par Michael Page, qui est aussi derrière Fire in the Head, et qui aime repousser constamment les limites du son et de ses diffractions. D'après les informations glanées ici et là THERE I SAW the GREY WOLF GAPING marquerait un retour pour Sky Burial à des compositions plus concises, voire plus accessibles (sic!), où collabore une demi-douzaine d'artistes de renommée dans les milieux underground; Danny Hyde (Coil), Jarboe, Anni Hogan (Marc and The Mambas/Willing Mambas/Willing Sinners), Jóhann Eiriksson (Gjöll, Reptilicus), Bridget Wishart (Hawkwind), Troum, Xiphoid Dementia et Craig McFarlane à la cornemuse. C'est un fascinant mélange de Steve Roach, Sigar Rus et Coil où les rythmes vaporeux et les atmosphères d'un univers parallèle flottent et implosent avec un zeste de poésie ectoplasmique.

Incantare tombe du ciel avec de denses couches sifflantes qui déchirent le vide. Malgré une odeur inconfortable, il y a une étonnante délicatesse derrière ces couches de synthé qui bourdonnent comme un gros nuage de mouches et dont la chute bouscule de lointaines cloches apocalyptiques. Alors que les bourdonnements se transforment en chœurs astrales sur le bord d'une rivière repentante, des tam-tams énergiques roulent sous cette intense masse synthétisée d'où pestent des voix hurlantes. Shedding the Husk endosse une approche cinématographique avec des cors géants qui soufflent une alerte à une invasion d'anges noirs. Le rythme est passif. Moulé dans ces élans gargantuesques qui roulent en boucles, il s'évapore tranquillement pour laisser dans son sillage des vestiges qui restent suspendus dans le vide, comme des grésillements sur une ligne morte. Mais la ligne est loin d'être morte! Des percussions fantomatiques imposent un décor de psychose surnaturelle qui amplifie toute la démesure d'une œuvre qui n'a pas fini de surprendre, car Carne[val] s'amène avec son espèce d'acide down-tempo psychédélique où le rythme est tissé dans une conjonction de bruits hétéroclites et de silencieuses impulsions qui refoulent dans les corridors d'un carnaval bizarre. C'est aussi délicieux que génial! Silence Moves est un long coït abstrait entre le silence et ses remords où les ondes éthérées de synthés forgeurs de vide s'entrecroisent sous d'étranges crépitements et de lointains bruits dérangeants. Et les ambiances de fantômes sur le bord d'une crise de nerf s'évanouissent pour faire place à un piano inattendu qui dessine les traits d'une délicate berceuse, bercée par des ondes d’un synthé dont les lignes parallèles nourrissent de plus en plus la passion des spectres de la nuit.

Beyond the Veldt est à crever la boule d'émotions qui nous bouffe le cœur. C’est un superbe et lent down-tempo où la batterie martèle un rythme lourd et fluide. Les strates crient de douleur intérieure qu'une superbe voix maternelle recouvre d'une tendresse insoupçonnable. C'est divin et ça mérite une place sur une compilation de 2012! Et que penser de Fools Circel 9wys et de son ossature anémique qui croupit dans les plus belles divagations de l'art abstrait? Peut-on parler de rythme? J'en doute, mais ça bouge d'un rythme organique où bruits de voix fantasmagoriques grugent les murs de l'aliénation. Bone to Beak (The Vultures Speak) et There I Saw the Grey Wolf Gaping sont des tordeurs d'ouïe! Ce sont deux titres qui privilégient un immobilisme cérébral dans des dimensions sonores aux tonalités de métal en fusion. Les lamentations de synthé crissent dans un lourd décor aspergé d'éther tétanisé, emportant dans ses voiles ocrés des gémissements chamaniques, alors que There I Saw the Grey Wolf Gaping laisse aussi entendre des mugissements de spectres irisés et des airs d'une cornemuse qui détonne dans cette finale apocalyptique qui me rappelle, et ne me demander pas pourquoi, le cynisme d'Eric Burdon dans Sky Pilot. Mettons que ce sont deux titres qui écorchent l'oreille.

Dérangeant? Oui! Fascinant? Certes! J'ai été étrangement séduit par l'univers fantomatique nourri de bruits blancs, de distorsions amniotiques et d'ambiances surréelles qui tapissent les rythmes douloureux et les atmosphères de Messes Noires de THERE I SAW the GREY WOLF GAPING. C'est un album intrigant que j’ai dévoré de mes oreilles curieuses et qui va séduire pour sûr les fans de musique noire et spectrale. Ça vous est déjà arrivé de trouver des filets de beauté à travers un être difforme? C'est la meilleure façon de décrire l'étonnant envoûtement qui nous tiraille après avoir entendu ce dernier opus de Sky Burial. À ne pas écouter seul si on s'ennuie de sa conscience!

Sylvain Lupari (02/11/12) ***¾**

Disponible au Sky Burial Bandcamp

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