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  • Writer's pictureSylvain Lupari

Ian Boddy: Strange Attractors (2012) (FR)

Updated: Sep 20, 2022

Si on voulait saisir sa carrière en un seul album, Strange Attractors serait le tremplin idéal

1 Amongst Dark Clouds 9:50

2 Parabolic Excursions 10:40

3 Crossing the Range 15:17

4 Strange Attractors 17:34

5 Return Vector 14:52

6 Trip the Light Fandango 7:11

(DDL 75:24)

(Berlin & England School)

Établi comme un chef de file incontestable de la MÉ depuis ses tous premiers pas en 1980, Ian Boddy est comme le bon vin, à l'exception que sa surconsommation n'endort ni ne saoule les sens mais surexcite l'émerveillement causé par un merveilleux cépage électronique. Année après année et album après album, le synthésiste Anglais a su développer une approche artistique où ses ambiances tant éthérées et cosmiques que chtoniennes et éclectiques se greffaient à des rythmes tricotés en de subtiles phases amovibles et évolutives dont les permutations passaient par de puissantes envolées synthétisées et/ou d'habiles montées séquencées, donnant à sa MÉ une approche extrovertie qui transcendait les murs d'une culture abstraite. Si l'on voulait saisir sa carrière en un seul album, STRANGE ATTRACTORS serait le tremplin idéal. C'est un album puissant et intense où les synthés tissent des ambiances sombres et fuyantes qui se fractionnent et se déchirent sur les récifs de rythmes affamés et friands de ses moments de perdition, unique aux climats de poésie glauque qui ceinturent les univers du fondateur de DiN label.

Enregistré en concert dans le cadre de la série des Awakenings EM Concerts en avril 2011, STRANGE ATTRACTORS est la 12ième œuvre disponible en format téléchargeable sur la plateforme Din Digital Download. Présenté dans une belle pochette aux graphiques attrayants et avec une série de photos tirées du concert, l'album débute dans une profonde immersion spatiale. Un peu comme un filament quittant avec résistance notre aura cérébral, une fine onde synthétisée échoue dans les profondeurs galactiques pour ouvrir Amongst Dark Clouds. Seul maître à bord, Ian Boddy multiplie les couches de synthé qui s'enroulent en une imposante valse lunaire orchestrale autour de fins carillons qui tintent dans un vide absolu. Intense et enveloppant, Amongst Dark Clouds nous enveloppe d'une aura de solitude d'où s'échappent de discrètes pulsations ainsi que des accords métalliques aux mouvements aléatoires qui bousculent légèrement les vents sombres qui mutent en chœurs cosmiques. De fines séquences aux timbres de percussions de verres dansent librement en ouverture de Parabolic Excursions, chassant les vapeurs morphiques de Amongst Dark Clouds. Ces séquences voltigent et tintent d'une envoûtante limpidité, un peu comme dans l'univers de Eddie Jobson et son fabuleux Theme of Secrets. Elles éveillent les impulsions d'une ligne de basse dont les élans corrosifs mordent un rythme statique qui est surplombé par des ondes de synthé aux sonorités de Martenot. Le mouvement tournoie, suivant une tangente sphéroïdale où brumes et chœurs cosmique unissent leurs secrètes identités pour en embrasser un confort hypnotique alors que tranquillement les séquences s'échappent, tambourinant de nouveau avec les ondes spectrales de Martenot. C'est dans les souffles acuités de Parabolic Excursions que s'amorce la descente de Crossing the Range. D'oblongs souffles aux lentes arches sinueuses en tapissent la profondeur abyssale pour se perdre dans un subtil mélange de chœurs astraux. En plein contrôle de notre momification cérébrale, Ian Boddy fait descendre des pulsations mécaniques qui surfent sur une brume cosmique alors que des cymbales expulsent des tssitt-tssitt flottants, prélude à un rythme alourdit qui s'amène sous les stries et les crissements d'un synthé aux ululements spectraux. Entre 2 deux phases rythmiques et 2 ambiances surréelles, Crossing the Range évolue avec toute son ambiguïté, caressant au passage les brumes chtoniennes et les rythmes progressifs et trépignant sur les cliquetis des percussions mécaniques qui tressaillent dans une onctueuse ouate mellotronnée. La finale explose d'un lourd rythme circulaire à la Arc à faire pâlir les enfers.

La pièce-titre enchaîne avec une approche post-apocalyptique où des couches de synthés menaçantes et de sinueuses réverbérations ceinturent de lourdes pulsations résonnantes. Il y règne une étrange ambiance d'un monde de détresse sidérurgique, un peu à la Blade Runner, qui s'apaise quelque peu après la 8ième minute pour laisser une douce flûte étaler ses sentiments célestes qui flottent amèrement dans un monde iconoclaste. C'est un bref moment d'apaisement où les vents de la pureté caressent les latentes distorsions d'un monde de destruction qui renaît de ses cendres avec ces ondes qui virevoltent dans une fureur cataclysmique, laissant chœurs et pulsations glauques frayer avec une arythmie démoniaque jusqu'à l'orée des temps. Là où les flûtes poussent leurs derniers souffles, sous les courbes réverbérantes d'arches sonores qui vrombissent dans l'isolement jusqu'aux portes de Return Vector. Après une intro où les vents sombres dispersent les ruines dantesques de Strange Attractors, le rythme tambouriné délicatement bifurque vers des séquences lourdes qui résonnent parmi des tintements cristallins et des ondes corrosives afin de converger vers un rythme hésitant sur ce débit fluide et harmonique. Un rythme saupoudré de délicieuses boucles qui roucoulent avec un zest de groove sur une ambiance à saveur chtonienne où les vestiges de Arc trempent dans les racines de Redshift avec des chœurs sombres qui errent sur une rythmique subtilement progressive. Hybride, le synthé libère une nuée de sonorités irisées qui éraflent la fluidité du rythme tout en fusant de courts solos plaintifs et de splendides strates ensorcelantes dont les vagues approches spectrales ululent au-dessus des percussions aux tintements de verres qui pétillent sur un nid de séquences pulsatrices. Le décor musical est terriblement riche et intense. Ian Boddy fait figure de pieuvre avec ses mains qui manœuvrent des synthés aux solos acuités, aux envoûtantes brumes tant méphistophéliques que cosmiques et aux chœurs ténébreux ainsi que des séquenceurs aux pulsations arythmiques et aux rythmes multiformes. Et finalement ces percussions électroniques aux frappes aléatoires et indisciplinées supportant une structure rythmique aussi complexe qu'hallucinante qui se termine dans un superbe croisement de Arc/Boddy/Redshift. Trip the Light Fandango conclut ce concert sur les chapeaux de roues. Des percussions claquantes ceinturent un mouvement séquentiel garni de multiples pulsations et percussions dactylographiées alors qu'un clavier dessine de fines harmonies avec des accords fluides qui voltigent autour de cette muraille de percussions et pulsations séquencées. Toujours en parfaite symbiose avec ses rythmes alambiqués, le synthé étale son lit de brume, ses ondes hybrides et ses solos perçants, cimentant Trip the Light Fandango dans son rôle de titre qui clôture un concert sous les étoiles avec un rythme bouillonnant. Un rythme qui graduellement s'éteint dans les fabuleuses et nostalgiques ondes Martenot. Des ondes chantant telles des baleines sur les coraux cosmiques.

STRANGE ATTRACTORS est un vrai tour de force qui démontre toute la dextérité de notre ami Ian Boddy à jongler avec sa panoplie d'instruments sans perdre la concentration nécessaire pour façonner un impressionnant monde musical où les rythmes et les ambiances s'enchaînent et se chevauchent dans un délicieux cocktail cosmique. J'aurais aimé voir à ce spectacle, ne serait-ce que pour voir la stratégie et l'architecture artistique qui a inspiré Ian Boddy à dépasser un stade d'improvisation afin d'offrir 6 titres solides où l'émotion et l'intensité sont le cœur d'une aventure musicale qui finalement n'a pas vraiment besoin d'yeux pour se faire comprendre. Voilà un album qui vous initiera au fabuleux monde de Ian Boddy et qui est disponible au bout de vos doigts au site de DiN.

Sylvain Lupari (19/02/12) *****

Disponible au DiN Bandcamp

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