“Avec des essences sonores extraites des racines musicales du milieu des années 80, Altered States s'avère être tout un enchantement”
1 Indian Garden 9:37 2 Heart of the Desert 10:25 3 Splendid Harmony 6:55 4 Indelibility 7:13 5 Altered States/Secret Illuminations 9:46 6 Raindance 8:00 7 Mescalito Exit 11:10 8 Altered States & Secret Illuminations 9:06 (Bonus Track) Projekt: Archive ARC00127
(CD/DDL 72:16) (Ambient EM with a zest of psy-tribal)
Je me souviens de ce temps où je ramassais tout ce qui se vendait, se partageait et s'échangeait sur Internet à propos de la MÉ. J'étais comme un enfant dans une confiserie. Sauf que je cherchais qu'un genre de bonbon; celui avec de grosses séquences juteuses et des solos de synthé appétissants. Et on m'avait aussi proposé ce ALTERED STATES par un groupe au nom étrange: SOLITAIRE. J'avais trouvé la pochette trop New Age pour daigner jeter un bout d'oreille. Même pas un souffle! Rien! Nada! Une chance que ce bon vieux Sam Rosenthal a persuadé le tandem Elmar Schulte/Rüdiger Gleisberg de dépoussiérer les bandes pour une édition 25ième anniversaire, avec une très belle pochette cette fois qui est plus mystique, sinon je serais passé à côté de quelque chose de très bon. Pour fin d'histoire; SOLITAIRE était un duo composé de Elmar Schulte, un amateur du style Berlin School de Tangerine Dream, et Rüdiger Gleisberg qui lui était, et est toujours, reconnu pour un style musical plus éthéré, plus cinématographique et plus ambiant. Le duo s'est formé en 1989 et a donné un premier concert quelques jours après la chute du Mur de Berlin, dont on retrouve un titre sur cette édition remasterisée de Projekt Records. ALTERED STATES fut leur premier album. Un album majeur que plusieurs chroniqueurs de l'époque n'hésitaient pas à décrire comme étant phénoménal, comme étant une œuvre essentiel dans l'histoire de la MÉ contemporaine. SOLITAIRE produira au final 5 albums, dont un avec Steve Roach (Ritual Ground en 1991) avant de fermer la boucle en 1997 avec Nocturnes, une œuvre ambiante et sombre.
Un très beau piano délie ses notes afin d'offrir une introduction toute mielleuse à Indian Garden. La musique fait très genre film, on croirait entendre Nosferatu de Florian Fricke, avec des lignes de brumes qui jettent un parfum de mélancolie sur les 2 premières minutes avant qu'une ligne de séquences détachent des ions qui ensorcèlent nos sens avec une approche sphéroïdale. Cette séquence entraîne Indian Garden dans une structure électronique minimaliste nouée dans des vaguelettes de rythmes oscillatoires que des tam-tams projettent dans une dimension plus astrale, plus tribale. Le rythme roule en boucle et les tam-tams tambourinent alors que d'autres éléments tel que Mellotron, et ses parfums de flûte, des percussions plus sages et des effets électroniques dramatiques, qui font très TD des années Le Parc, se greffent et amènent Indian Garden au niveau rythme le plus électronique, avec Secret Illuminations, de cet album. Heart of the Desert nous amène dans l'univers plus ambiant de SOLITAIRE. C'est un titre très tranquille, noué dans des nappes de synthé célestes qui s'agglutinent en une masse compacte et dont le gros nuage sombre gronde et avale des riffs solitaires, qui affiche plus d'intensité à mesure que les secondes coulent au cadran. Disons que c'est plutôt envahissant comme mélodie minimaliste. Mais ce n'est rien comparé à l'approche de Indelibility qui, après une intro moulée dans des échantillonnages de voix et de percussions du Moyen-Orient, nous plonge dans le diabolique univers de John Carpenter et son fameux Halloween. Étonnant et envoûtant. On comprend un peu plus pourquoi la musique de SOLITAIRE trouve sa place dans des films tel que Heat et Blade. En ce qui me concerne c'est la principale force de ALTERED STATES. Cet art que possède à mélanger les genres et les ambiances font de cet album un véritable boîte sonique à surprises.
Les nappes de voix qui ouvrent Splendid Harmony me projettent littéralement dans l'univers de French Skyline par le duo Américain Earthstar, paru quelques 10 ans plus tôt. L'amorce est très méditative et spirituelle. Elle débouche vers les brises d'un Mellotron chaud dont les souffles successifs et minimalistes, marinés avec des nappes de voix plus célestes et celles d'un synthé aux harmonies finement perçantes, tracent un genre de procession ascendante. C'est très genre ode pour désert de rêves à la Steve Roach avec une forte ascendance pour le genre French Skyline. Mescalito Exit est un titre ambiant très sombre avec une nuée de drones qui gargouillent dans les harmonies solitaires et ambiantes d'un synthé aux ombres écarlates. Là encore les influences de Roach sont notables. L'introduction de Altered States/Secret Illuminations est très pompeuse, genre musique de film où les anges déchirent le manteau de la race humaine. Les nappes de synthé auréolées d'une Méphistophélique tombent avec rage, inondant les premières minutes d'une approche post-apocalyptique. Une pulsation se détache un peu avant la 3ième minute , entraînant des tapages hétéroclites et des murmures de Cyborg vers une structure plus électronique. La structure est minimaliste et imbibée de ces nappes de voix à la Earthstar. Elle secoue ses ions passifs vers la 6ième minute, initiant un rythme tranquille bercé par les harmonies dispersées d'une ligne de flûtes et de denses nuages aux couleurs de l'émeraude. Raindance exploite aussi cette approche de mélodie minimaliste à la Indelibility et Heart of the Desert mais dans une enveloppe plus onirique, avec de doux parfums de flûte, et légèrement plus animé, avec de belles percussions tam-tams. Ça me fait penser énormément au très beau Cornucopia de Matthias Thurow qui lui a été réalisé en 1986. Et cet étonnant album, une très belle surprise pour moi, se termine avec une belle interprétation de Altered States/Secret Illuminations qui trouve une forme plus ambiante ici.
J'ai adoré partir à la découverte de ALTERED STATES. J'ai découvert un album très éclectique qui était fortement inspiré de ce mouvement très méditatif des années 85-90 avec une touche vintage pour les nappes de voix assez séduisante. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'est un chef d'œuvre, sauf que les parallèles et les étroits liens qui les unissent avec les musiques de Steve Roach, Earthstar, John Carpenter et Matthias Thurow sont très exacts et confèrent à cet album une place de choix parmi les bons albums de ces années. Si le genre ambiant méditatif animé par de belles mélodies minimalistes vous attire, cet album vous est tout à fait désigné!
Sylvain Lupari (30/07/15) *****
Disponible au Projekt Records Bandcamp
Comentários