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Writer's pictureSylvain Lupari

KELLERKIND BERLIN: Musikkonstruktionen (2021) (FR)

Ce cd s'inscrit dans la lignée de ces contes musicaux intenses et poignants de Otarion

1 Lied für Cara 7:02

2 Zukunftsvision 10:50

3 Intermezzo 5:50

4 Frisch vom Dach 9:02

5 Bittersüsse Quarantäne 10:12

6 Winterspaziergang bei Sonne 6:54

7 Schmetterling im Schneegestöber 15:02

(CD/DDL 64:53)

(Cinematic EM)

Une nappe de synthé teintée de mélancolie ouvre Lied für Cara. L'approche est très émotive et se développe en un rythme léger, dominé par de sobres percussions. Des accords de clavier imitant ceux d'une guitare débute la vision mélodieuse du titre, alors qu'une ligne d'arpèges séquencés papillonne sur place tout en suivant la lente valse astrale des orchestrations cinématographiques de l'introduction. Flirtant avec l'univers sombre et mélodieux de Otarion, Christian Gorsky se sert de son piano électrique pour parfumé Lied für Cara d'une vision où la tendresse, l'affection et la gratitude fusionnent sur un premier titre qui démontre que Way Out n'est pas un accident qui démontre le talent de compositeur de Kellerkind Berlin. MUSIKKONSTRUKTIONEN suit le prestigieux prix Your Own Way des Schallwelle Awards de 2019 que l'artiste Allemand a reçu, lui donnant ainsi l'argent nécessaire pour qu'il puisse enregistrer et produire son propre cd manufacturé. Construit sur 7 titres composés dans l'esprit d'une musique électronique (MÉ) narrative, MUSIKKONSTRUKTIONEN est dans la lignée des œuvres intenses et poignantes qui sont teintées de sombre mélancolie de Rainer Klein, celui qui année après année nous balance les opus émouvants de Otarion. La Covid 19, la pandémie et le confinement global sont au cœur de cet album dont le travail fut constamment soutenu par l'épouse de Christian Gorsky, d'où le titre Lied für Cara.

Une suite de basses pulsations développe tranquillement Zukunftsvision qui dès les premières secondes revêt une texture orchestrale avec des arrangements de violons. Un langage synthétisé croasse dans ce décor d'ambiances où émergent de charmants et discrets riffs de flûte. Le titre déploie une intensité, tant dans sa lente évolution rythmique que ses arrangements, dans cette introduction qui fait penser à du bon Broekhuis, Keller & Schönwälder. Les percussions qui déboulent un peu avant la 5ième minute, chamboulent les ambiances afin de structurer une lourde procession ombragée par les salves saccadées des violons. Le synthé manipule une texture de flûte pensive et harmonieuse qui domine les orchestrations. Très émotive avec des notes hautes, cette flûte enchantée fait avancer Zukunftsvision vers une texture plus électronique dans une finale plus animée qui rejette toute forme de débordement. Une MÉ lourde, lente et très émotive est l'apanage de cet album. Et un titre aux allures de musique classique contemporaine tel que le très cinématographique Intermezzo confirme cette tendance. Ayant travaillé étroitement avec la maison Manikin, il n'est pas surprenant que les influences de Mario Schönwälder et des artistes de son label soient présentent sur cet opus de Kellerkind Berlin. Les éléments percussifs et les orchestrations qui dictent la cadence minimaliste de Frisch vom Dach sont de fidèles indicateurs. La flûte du mellotron est perçante sur un lit de séquences qui fourmillent comme un essaim d'asticots percussifs. Nous sommes dans le New Berlin School pur avec des orchestrations aussi saccadées que les riffs nerveux du clavier qui épousent ce mouvement statique du séquenceur alors que le rythme, toujours plus neurotique-statique qu'entraînant, s'habille d'une couche d'intensité dans une poignante structure ascensionnelle. Le mellotron est intense et captivant sur ce titre!

En ouverture de chronique, je faisais un parallèle avec la musique de Otarion. Et ça ne peut pas être plus évident qu'avec Bittersüsse Quarantäne. Des accords sonnant comme une harpe-guitare se heurtent à une menaçante ombre de synthé en son ouverture. Immuables, ils tintent avec harmonie sous cette onde grondante que des percussions commencent à picorer très tôt. Ces dernières structurent un rythme statique finement animé sous une transformation du synthé qui lance en parallèle des nappes flottant avec une essence de Tangerine Dream dans le timbre. Les percussions et les réverbérations constituent le noyau d'intensité de ce titre qui est vite dépassé par cette mélodie interprétée dans cette fusion de fausses guitares et harpes. Jouant à merveille sur ses 10 minutes, Bittersüsse Quarantäne se développe avec une lenteur plus cinématographique que rythmique qui attise les tisons de notre âme avec cette splendide mélodie qui nous hantera bien des heures après sa dernière écoute. Je dirais que nous sommes dans l'antre de l'intensité émotive de MUSIKKONSTRUKTIONEN parce qu'un titre comme Winterspaziergang bei Sonne nous en met plein les oreilles avec une belle approche harmonieuse à la Peter Baumann, Trans Harmonic Nights. Basses pulsations et batterie teutoniques structurent son rythme entraînant alors que le mellotron lance un de ses parfums mélodieux qui reste intact dans les denses orchestrations. Le meilleur est pour la fin! C'est le très long Schmetterling im Schneegestöber qui nous en informe. Arqué sur de sobres percussions et des basses pulsations sautillant légèrement, son rythme lent est aussi envoûtant que la danse d'un serpent ensorcelé par son charmeur. Et le parallèle dépeint assez bien les ambiances du Moyen-Orient qui parfument sa lente progression. Les orchestrations, de même que ce douillet lit de flûte, enracinent cette perception à mesure que la lente évolution de Schmetterling im Schneegestöber lance ces filandres mélodieuses sous ces fascinantes éclosions d'effets sonores qui tissent un décor surréaliste en arrière-scène. Sombre, quasiment chtonien, et hypnotiquement mélodieux, ce dernier titre de MUSIKKONSTRUKTIONEN ne peut être que ce dernier acte qui conclut un étonnant album qui ne mérite pas de rester dans son anonymat. Il reste encore quelques cd!

Sylvain Lupari (01/06/22) ****½*

Disponible au Kellerkind Berlin Bandcamp

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