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Writer's pictureSylvain Lupari

Remy Sense (2006) (FR)

Sense est pour ceux qui croient que la MÉ peut-être plus audacieuse sans être ennuyeuse

1 Being 5:28

2 Destination 16:09

3 Behaviour 7:55

4 Maze 19:37

5 Mortality 12:47

6 Déja Vu 7:00

(CD/DDL 68:54)

(Orchestral Berlin School, Trance, Cinematic themes)

Il n'y a pas grand monde qui ait encore parlé de ce nouvel album de Remy, SENSE. Pourtant son nom circule allègrement dans les sphères de la Musique Électronique, genre Berlin School, depuis Exhibition of Dreams. En fait, il est sans doute l'artiste, avec Indra, qui se rapproche le plus du style de Klaus Schulze. Jouant sur les rythmes, les atmosphères et les multiples couches de synthé, il aime explorer et peaufiner ses longues compositions. On dit de SENSE qu'il a un style différent. C'est donc avec un certain empressement, mêlé d'appréhension, que j'avais hâte de l'entendre. J'étais surtout impatient d'entendre ce qui s'annonçait comme étant différent.

Being démarre bien! L'ambiance est intime avec un doux piano et un violoncelle se font la cour sur une trame mélodramatique. Les notes coulent avec beauté et se fondent en une belle mélodie sombre, un peu comme un générique de film. C'est avec Destination que l'on peut saisir le sens de différent. Après un début atmosphérique assez étrange, où on a l'impression que des billes flottent en apesanteur sur d'épaisses couches de synthé, les sons se distordent et font place au violoncelle qui se brouille sur des voix fantomatiques. N'était-ce pas les charmes de Exhibition of Dreams? Ces voix chantent sans vraiment chanter. Le violoncelle frotte sans vraiment frotter. On a l'impression de flotter dans un monde irréel. Tranquillement, des notes se joignent et forment un genre de rythme funky bass bien étouffé. Ce mouvement est drapé d'une onde synthétisée qui forme une épaisse couche sonore sur un tourbillon musical qui prend graduellement forme. Une cadence de transe pour zombies, inondée de strates assez intenses, envahit les hauts parleurs, faisant oublier cette intro assez déroutante. Dès cet instant, Destination crache un rythme soutenu inondé par des synthétiseurs enveloppants, d'où fusent d'admirables et percutants solos. Un moment de culture qui demande une grande ouverture, mais qui en vaut totalement la peine. Mais avisez vos voisins, car certains pourraient en être inquiétés.

Après un titre aussi déroutant, Behaviour fait figure d'enfant pauvre avec un beau mellotron qui recouvre les atmosphères d'une belle couche de voix sur des tisons et de la fumée à la Blade Runner. Une plage sombre de 8 minutes inondée d'effets sonores qui faisaient les délices des fans de Klaus Schulze dans les années 70. Maze me rappelle les étranges collaborations entre Klaus Schulze et Arthur Brown. Ici c'est entre Remy et Mattie, un artiste alors inconnu pour moi, que ça se passe. Sur de beaux arrangements aux arômes d'un violoncelle, Mattie explique la pression et les pièges du labyrinthe. La musique est superbe et reflète à la perfection les angoisses d'être piégé dans des couloirs sans fins. On y est et nous sentons ces couloirs, tant la musique est réaliste. Une superbe trame angoissante digne d'un film haute-tension. Cette ambiance hypnotique nous fige jusqu'à ce que le violoncelle se mette à trébucher et que la batterie embarque, propulsant Maze dans une direction musicale plus cadencé. Le violoncelle se métamorphose en violon et c'est la course effrénée entre les percussions, qui cognent avec précision et férocité, et le violon qui chauffe les cordes avec force et agilité. Ce beau concept se dessine sur une basse superbement efficace et de gros solos de synthé. Un titre hautement travaillé! Un grand moment qui semblait pourtant assez banal. Mortality est la pièce charnière sur SENSE. Continuant sur les arrangements de violoncelle qui terminait Maze, Mortality avance dans un couloir étroit où la froideur se réchauffe sur une fine ligne synthétisée qui se berce aux gré des illusions perdues. Un titre intense qui abrite des chœurs discrets et qui dérive sur une ligne plus animée. Et on ne peut faire autrement que de dresser un parallèle avec la sinueuse et sensuelle ligne qui faisait les charmes de Body Love, de KS, avec une batterie méthodique en plus. Un autre bon titre sur ce dernier album de Remy qui se termine avec les vocalises de Mattie. Deja Vu est un titre sans rythme qui vire sur d'immenses strates synthétisées et les voix mi-humaines et mi-droïdes de Mattie. La musique est somptueusement dense, et la présence de Mattie ajoute un élément intriguant. Il joue avec sa voix, comme un instrumentiste, passant d'un timbre suave à la Bowie, aux intonations ténébreuses à la Rob Zombie.

Alors, différent ce SENSE? Oui si on considère l'évolution ou les déviations de son propre style comme étant différent. Pour moi c'est du Remy. Un artiste qui marche sur les traces de son inspiration à merveille. Comme Schulze, il sort des sentiers de la musique programmée pour offrir une œuvre plus personnelle et plus intense. Des titres comme Destination et Maze débordent d'intelligence et d'audace. SENSE s'adresse à un public plus averti. Un public qui ne craint pas de se frotter les oreilles à une musique plus avant-gardiste. De la Musique Électronique, style Berlin School, mais extrêmement plus progressive.

Sylvain Lupari (07/07/08) ****¼*

Disponible chez Deserted Island Music

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