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  • Writer's pictureSylvain Lupari

KLAUS SCHULZE: Beyond Recall (1991) (FR)

Beyond Recall est construit dans un audacieux modèle d'échantillonnages qui transcende toutes les frontières de l'anti-musique

1 Gringo Nero 26:54   2 Trancess 12:50   3 Brave Old Sequence 11:02   4 The Big Fall 11:35   5 Airlights 14:34 Virgin CDVE 906

(CD 77:07)

À la fois audacieux et fascinant, BEYOND RECALL est un album difficile d'accès qui souffle des arômes de Miditerranean Pads sur des approches que je qualifierais de plus harmonieuses mais sur des rythmes qui sont étrangement flous. Des rythmes imprécis qui se mesurent à des échantillonnages très bariolées et qui compétitionnent avec des accords de piano et de guitares, mais rarement avec des séquences et des envolées synthétisées, sur des percussions dont les frappes ignorent tout à propos des schémas rythmiques structurés. Il en résulte à un énorme collage musical où Klaus Schulze dépasse les frontières anticonformistes en présentant un album plus sonore que musical où les harmonies se distinguent dans une mer de sonorités aussi éclectiques que parfois musicales. Et ce long voyage multi sonore débute avec le sublime Gringo Nero. Sublime en raison de sa structure, mais je ne suis pas sûr au niveau de sa musicalité. Je suppose que c'est en fonction de votre degré de curiosité musicale.

Devenu un classique du répertoire de Klaus Schulze après des adeptes du collage musical (on peut entendre une multitude de ces échantillonnages sur des groupes tels que Future Sound of London et la relève de la MÉ du genre techno et psy-trance), Gringo Nero est un long titre avec des étrangéités sonores qui proviennent des profondeurs des forêts tropicales sur un pattern musical électronique qui ressemble drôlement à ce que Schulze et Göttsching avaient créé dans In Blue. Un tempo hallucinogène, à la limite funky, où les corps mous se dandinent avec hypnose et contemplation dans les reflets d'une guitare acoustique qui arrache ses accords sous des percussions composites aux frappements aussi éparses que leurs sonorités. Des flûtes, beaucoup de flûtes tribales, aromatisent cette ambiance cérébrale où des ahum-ahum-ahum incantent une approche passive parmi des souffles de désirs et de passions qui flottent et dansent dans un univers éclectique dont le surréalisme ferait l'envie de Salvator Dali et de Vangelis, pour l'approche documentariste. Un titre époustouflant, Gringo Nero est superbement riche avec des sonorités qui dépassent l'imagination et qui trompent un rythme flou dont l'imprécision est le berceau d'une folie mélodieuse qui trace une étonnante voie harmonieuse. C'est devenu un titre culte qui est la structure de BEYOND RECALL et dont les cendres sonores et les rythmes défusionnés iront garnir les approches inorthodoxes de l'étrange jazzé The Big Fall et le dramatique Airlights avec son lourd piano acerbe qui trempe ses notes froides dans des vocalises imperceptibles et une finale boréale qui me rappellent un peu les échantillonnages de Tangerine Dream dans l'époque de Le Parc. Tout à fait étrange et tout à fait au-delà de ce que Schulze a créé à date (nous sommes en 91).

Une intro lugubre, avec des violoncelles austères qui embrassent un piano hésitant, ouvre les sombres horizons de Trancess. Une douce flûte, dont la tonalité rappelle le travail et l'esprit mélodieux d'Audentity et que l'on retrouve aussi sur Airlights, et une voix féminine éthérée à l'extrême traversent Trancess qui flotte dans un monde d'ambiguïté avec ses lourdes cordes, ses percussions dispersées dans une structure de rythme hybride qui est divisé entre l'improvisation et la structuration. Il s'agit d'un beau et bon titre étrangement fascinant qui ferait les frais d'un bon film d'épouvante, un peu dans le genre de Dresden 4. Des accords cristallins voltigent en intro de Brave Old Sequence. Une ouverture qui n'est pas sans rappeler le poétique Crystal Lake, même si l'approche est plus animée. D'ailleurs on a cette certitude que c'est un remix de Crystal Lake tant la rêveuse structure y respire avec une cadence plus vive et des échantillonnages qui n'y étaient pas. La morosité mélancolique y est bien ancrée et repose sur des vocalises un peu suggestifs mais à peines perceptibles. Le rythme érigé sur des tonalités en verre poursuit sa quête avec un crescendo qui culmine vers un monde insolite où échantillonnages vocaux se fondent à des flûtes tribales avant de revenir à son approche harmonique et cristalline initiale.

Un peu comme les contrastes qui s'attirent pour former une union hétéroclite, BEYOND RECALL est l'audace culturelle même. C'est un album qui transcende toutes les frontières de l'anti musique pour finalement donner une œuvre poétiquement musicale si on force l'écoute. De la musique sans rythmes concrets mais avec une folie créatrice qui a fait évoluer la musique électronique contemporaine avec l'éclosion des DJ et de leurs panoplies d'échantillonnages sonores. Moi j'ai bien aimé cette approche audacieuse. Mais je suis un fan. Par contre, et avant tout, je suis un fan d'émotions, de rêveries et de poésies qui démontrent que les frontières n'ont pas de balises. On en trouve un peu mais il faut vraiment les entendre entre les notes. Si ça vous tente, c'est un album à écouter en toute attention afin de saisir la dimension du personnage qu'est… Mais si on ne l'a pas encore saisi, je vous recommanderais de débuter par un album moins expérimental. Et ne sautez pas à Airlights si vous n'avez pas encore apprivoisé Trancess ou The Big Fall car la sensation de métal qui écorche vos oreilles pourrait avoir raison de votre patience. Un gros merci à Snooky qui m'a retrempé dans cet univers perdu de Klaus Schulze.

Sylvain Lupari (25/09/09) ***½**

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