“La seule faiblesse d'Umbra est qu'il doit avoir une fin. Comment un tel chef-d'œuvre de la MÉ moderne doit-il aboutir? Cherry Bomb!!”
1 Arcadia 14:24 2 Proxima Obscuro 13:32 3 Umbra 8:07 4 Autostratus 11:44 5 Panthera 10:01 6 Cherry Bomb 10:34 DiN | 045
(CD/DDL 78:24) (Dark and haunting Berlin School)
Arc est devenu Redshift, vice-versa! Et peu importe le chapeau que porte Mark Shreeve et Ian Boddy, leurs signatures musicales restent tout à fait uniques. En fait ils font partie d'un groupuscule très restreint qui, tout en rendant hommage aux fibres de leurs réminiscences, ont réussi à construire un son, à bâtir un concept qui transcende les terroirs de leurs influences. Dès Octane, comme dès Redshift 1, on savait que les deux icônes de la England School allait imprégner leurs empreintes dans ce petit collectif de fans de MÉ. Plus de 4 ans après le très solide Church, Arc revient avec un 7ième album intitulé UMBRA. Un puissant album de type Berlin School. Et comme dans tout bon Berlin School imprégné de mysticisme et de gothisme, et celui-ci est très bon croyez-moi, le rythme naît d'une horde de bruits baroques et galope à perdre haleine sous les morsures des bêtes soniques pour tenter un refuge dans un bref moment d'illusion ambiosphérique afin de se ruer à nouveau dans une autre peau et sous un nouveau chapiteau sonique toujours aussi menaçant, aussi angoissant. Un album où les ombres des séquences et des mélodies gothiques hantent des structures de rythmes complexes qui n'en finissent plus de séduire l'oreille.
Une effusion de sons, de lamentations spectrales et de vrombissantes réverbérations aux ondes saccadées annihilent la pluie d'applaudissements qui ouvrent ce 5ième spectacle que Arc donnait au E-Live Festival en Hollande le 19 Octobre dernier. Une ligne de séquences offre ses ions rebelles qui ruent tout en courant dans un couloir rythmique nourri de bruits ectoplasmiques. Arc déploie ainsi son arsenal de séquences et de tonalités spectrales sur une ligne de rythme qui se fait subtilement attaquer par des frappes de percussions électroniques dont les brefs roulements sont emportés dans les airs des synthés aux ondes nocturnes. Le rythme de Arcadia répond à cette fusion de séquences et percussions, comme il répond aussi à la vélocité des nappes de synthé aussi mélodiques que très enlevantes, filant à vive allure dans des ambiances aussi noires qu'un voile de terreur. Nous sommes dans les sombres territoires de Arc où tout tourne autour du mysticisme et du baroque, alors que Arcadia ralentit un peu sa course avec des ions plus isolés qui sautillent comme des pas perdus dans des nappes aux étranges roulements de voix glauques et des roucoulements flûtés qui peu à peu restructurent un rythme qui s'envolera de nouveau avec des nappes de voix plus éthérées et ces nuages aux orchestrations de brume qui volent plus vite que le temps. Toujours très actif sur les réseaux sociaux, Ian Boddy a effectué un sondage maison à savoir si les fans voulaient des applaudissements ou non entre chaque titre. Les applaudissements ont eu la cote. Je ne me souviens pas de ce que j'ai répondu (maudits antidouleurs), mais je dois admettre que ces hourrahs dérangent une superbe mosaïque musicale qui n'a aucune faille. Après de denses vents noirs truffés de lourdes nappes d'orgue méphistophélique et de bruits organiques, Proxima Obscuro s'extirpe des ténèbres avec une nuée d'ondes vacillantes. Le rythme qui le porte est aussi lourd que vif et suit un tunnel noir où rode une horde de bruits somatiques. Hormis un rythme de plomb, il y a les solos. Des solos de synthé aussi musicaux que spectraux. Ils suivent les courbes d'une structure de rythme qui modulera ses phases au gré d'ambiances qui nous plongent au cœur des années vintages de Tangerine Dream. De fait, Proxima Obscuro sera le seul titre de UMBRA à porter ce sceau. Le reste c'est du Redshift dans la peau de Arc ou vice-versa!
Comme la pièce-titre et son tribun à la voix gangrenée de râles et de souffles perfides. Le rythme est là! Tapis dans l'ombre il palpite, comme il cogite, avec une dérangeante mais fascinante aura mélodieuse. Traversant les ponts de sérénités obscures et les ambiances caverneuses de Umbra, il tremble, comme il résonne, en sautillant de ses pas agiles et en faisant gronder ses ombres dans des nuages de brumes aux teintes d'éther et des mélodies évanescentes avant de nous envahir avec de lourdes nappes fantomatiques et de libérer une fascinante et envoûtante mélodie spectrale. Les poils de nos bras cherchent nos larmes! UMBRA imbibe nos oreilles avec un déroutant crescendo teinté de noir où Ian Boddy et Mark Shreeve tissent des rythmes dont les anfractuosités épousent des structures ambiosphériques parfois aussi violentes que les courses des séquences. Autostratus est le titre le plus tranquille et pourtant le plus noir de l'album. Des chœurs chthoniens transposent un rythme mu par des ondes de synthé et des séquences tranquilles qui rampent comme des centipèdes aux articulations de verres. La finale est tissée dans de la soie noire avec des séquences au rythme finement flûté qui sautille dans de lourdes nappes de brumes trouées de rayons sibyllins. D'orgiaques nappes d'orgues tombent des nues pour dévoiler le rythme sanguinaire de Panthera. Alors que nous pensions le paroxysme atteint, ce titre lourd et vif redéfinit les limites des rythmes modulés par le gros Moog. On y suit carrément les mouvements d'un félin qui court dans une jungle sonique aux lourdes nappes vampiriques et aux hurlements spectraux à faire tituber les âmes les plus solides. Brillant et efficace! Nous sommes aux portes de l'extase lorsque Cherry Bomb fait tinter son carrousel de verre dont la fragile mélodie nous amène aux orées de la rêverie. Il y a des flûtes tellement enchanteresses, comme il y a des lourdes respirations des séquences ainsi que d'étranges pleurs mélancoliques qui se noient dans des chœurs célestes. C'est le paradis aux portes de l'enfer car quand ça part, ça défonce! Ce qui me vient en tête c'est ce superbe Bombers in the Desert de Redshift (Ether) avec un rythme à la limite de la violence où la guitare électronique de Ian Boddy calque les sauvageries de Rob Jenkins sur un beat qui scierait très bien à un intense film d'espionnage... Hallucinant! On en veut encore, mais c'est déjà fini. La seule faiblesse de UMBRA!
Sylvain Lupari (11/06/14) *****
Disponible au DiN Bandcamp
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