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Writer's pictureSylvain Lupari

Mathias Grassow Through an Unknown Stargate (2022) (FR)

Un très bel album de musique ambiante un peu complexe où se croisent les univers de grands noms du genre

1 Born out of Nowhere 4:03

2 The Drivers of Fate 25:17

3 Greenwashing 8:59

4 Through an Unknown Stargate 35:15

5 Through an Unknown Stargate (Bonus Track) 60:24

(DDL/CD(r) 73:37)

(Ambient Music)

Les dirigeants de Cyclical Dreams continuent d'amasser les grosses prises. Après Michael Brückner, Christian Fiesel et Paul Ellis, le label Argentin se propose de nous faire découvrir la musique d'un vétéran de la musique électronique (MÉ) atmosphérique, Mathias Grassow. Le musicien Allemand possède une impressionnante discographie de plus de 400 parutions (K7, vinyles, CD, compilations et téléchargements) réparties sur une distance de 42 ans, soit depuis Erste Aufnahmen K7 paru en 1980. Son nom est plus souvent qu'autrement associé à une MÉ plus ambiante expérimentale avec parfois des séquences de rythmes hypnotiques. C'est exactement ce qu'on retrouve sur THROUGH AN UNKNOWN STARGATE, un album plus intéressant qu'on peut anticiper et qui possède ces ingrédients nécessaires afin de séduire un public plus large. L'album a été réalisé dans le cadre des sessions Interstellar Ambiance au printemps 2022. Pour Mathias Grassow, c'est la question instrumentale à l'humanité; où va notre planète si nous continuons comme ça...

C'est sous un nœud d'ondes vibrantes et de souffles gutturaux se défaisant dans l'ombre de tintements que Born out of Nowhere active un rythme lent autour de sa seconde minute. Les murmures ont cette texture de didgeridoo comme aussi de bêlements d'un croisement entre homme et mouton. On serait porté à croire à une vague incantation tribale que les percussions enracinent avec des battements lentement espacés qui structurent une lascive transe hypnotique, alors que la texture sonore est stigmatisée dans de sinueuses brises bourdonnantes et des ululations incantatoires. The Drivers of Fate débute avec une opaque onde de bourdonnements. Une onde plus musicale oscille derrière ces sourds vrombissements, contrebalançant la vision très ténébreuse des premières minutes d'un long titre où nos oreilles doivent être aux aguets afin de capter les multiples nuances, comme ces souffles aux vibrations plus chtoniennes, qui se développent à l'intérieur des 25 minutes de ce titre purement atmosphérique. Un cor chtonien s'extirpe de ce nuage de radioactivité bourdonnante un peu après la 5ième minute. Ses longues lamentations vont et viennent dans cette docile turbulence des éléments atmosphériques, amenant un côté plus lyrique que sibyllin à cette passive ode sonore. Le mouvement est linéaire et offre peu de gradation émotive dans sa croissance jusqu'à ce que des percussions arrivent comme par enchantement quelques secondes avant la 15ième minute. Les frappes donnent vie à un rythme métronomique ayant la précision d'une horloge et anime par ricochet la dense toile atmosphérique de The Drivers of Fate qui peu à peu se dirige vers une finale légèrement plus intense. Greenwashing propose une fascinante structure de rythme pas fait pour danser mais pour penser. Un rythme statique étonnement structuré sur des accords miroitant d'un effet de voix sibylline qui s'accrochent à des basses pulsations ou à des courtes exclamations cadencées d'une basse sans envie de rythme. D'ailleurs, une ombre de basse s'en détache pour y planer lourdement. Cet élément injecte un caractère expérimentale à cette étonnante structure qui bouillonne de l'intérieur tout en faisant chanter un dialecte incompréhensible à une chorale de spectres chérubins. Différent, mais il y a quelque chose ici qui magnétise nos tympans à l'évolution d'un titre qui se termine en jérémiades bourdonnées par des vents gorgés de murmures.

Des lignes de synthé iridescentes illuminent l'ouverture de Through an Unknown Stargate. L'horizon musical est vaste avec des éléments qui s'ajoutent afin de créer un climat sonore dont la portée attire nos sens sur les fines modulations d'une musique pour le moins astrale. J'aime le chant de ces ondes de synthé vacillant comme des flammes en manque d'oxygène sur une onde de brume qui cherche à se clouer au sol. De sourds éléments percussifs jettent un effet de froissement cadencé alors que des accords tintent ici et là, auréolant les ambiances d'une vie musicale éphémère. Pour le reste, le mouvement reste planant. Linéaire avec de subtiles modulations qui lui donnent par moment cette énergie musicale nécessaire pour vivre au-delà de ses 35 minutes. Des nappes ayant une tonalité d'orgue se proposent en offrandes musicales, et la fusion avec ces ondes de chants irisées cimente cette parfaite balance entre l'ombre et la lumière qui maintient l'intérêt de découvrir toujours un peu plus l'évolution de Through an Unknown Stargate qui emprunte un corridor plus ténébreux autour de la 12ième minute. Ce nouvel élan de bourdonnements absorbe quasiment les chants opalins qui restent juste assez présents afin de contrebalancer l'impact de cet énorme drone sonore. Le son de l'orgue prend plus d'ascendance sur la progression du titre, amenant une belle pointe d'émotivité qui va croissante tout au long de sa seconde partie. Les tintements ne sont pas tout à fait disparus. Ils irradient faiblement autour de la 22ième minute, endroit où la longue pièce-titre échappe un petit filon de mélodie ambiante et où les nappes deviennent plus émotives. Un sourd battement se fait entendre autour de la 24ième minute. Les tintements et la musicalité plus définie des nappes, jumelés à l'éclosion de ce rythme de transe hypnotique, vissent notre esprit à une finale intense qui a entrepris son escalade peu après l'arrivée des battements métronomiques. Un titre qui a un énorme pouvoir ensorceleur depuis ses premiers instants!

J'ai été agréablement surpris par THROUGH AN UNKNOWN STARGATE. De ce que j'avais entendu à propos du style de Mathias Grassow, j'anticipais un album d'ambiances complexes qui flirterait avec un genre expérimental peu propice pour mes oreilles parfois assez frileuses. Mais c'est tout le contraire! J'ai découvert un très bel album où les univers de Steve Roach, Paul Ellis et Byron Metcalf croisent leurs destinées pour une vision plus ténébreuse mais toujours magnétisante pour les sens. À découvrir!

Sylvain Lupari (01/10/22) ****¼*

Disponible au Cyclical Dreams Bandcamp

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