top of page
  • Writer's pictureSylvain Lupari

KRYFELS: Parsec (2014) (FR)

Parsec est un album à posséder pour tous ceux qui se nourrissent de la discographie de Klaus Schulze, années Cyborg à Mirage

1 Urvent 8:46 2 L'au-revoir des Elements 11:49 3 Gienah 12:18 4 Andromede 20:20 5 Canopus 8:58 6 Alcyone 11:35 PWM-Distrib (CD 73:52) (Vintage ambient EM)

Les vents qui hurlent et sifflent sont communs. Ils meublent intros et finales. Lorsque ces vents se mêlent dans une tempête magnétique et se mutent en torsades réverbérantes, on fronce les sourcils. Ça commence bien. Et puis il y a une nappe de synthé qui étend une musicalité de vieil orgue. Son voile sibyllin se faufile au travers les hurle-vents. Et la rencontre fait jaillir des ions séquencés qui sautillent et se bousculent dans l'ombre des vents qui traînent leurs poussières prismiques. Et là, on rêve. On rêve de Klaus Schulze et de son magnétique Mirage. Les vents font aussi naître des discrets solos, plus musicaux, dont les chants se perdent dans une superbe série de séquences qui monte et descend des spirales astrales en suivant les courbes des fines modulations qui habillent Urvent d'une noblesse dramatique. Quelle façon d'amorcer un album! Quelle façon aussi de nous introduire à l'univers plein de paradoxes et rebondissements qu'est celui de PARSEC. Paradoxes et rebondissements, parce que Kryfels explore tous les canevas de la MÉ des années analogues, brillamment séquencée comme délicieusement ambiante, doucement mélodieuse comme mystérieusement nébuleuse. Kryfels est la dernière trouvaille du label Français Patch Work Music. Et c'est toute une trouvaille! Musicien et photographe, Richard Raffaillac a autant l'œil que le doigté afin de tisser des ambiances à faire soit chavirer l'âme qu'à le tourmenter. C'est, à ma connaissance, son premier album. Un album qui caresse les vieilles armoiries de la Berlin School expérimentale des années analogues avec d'intenses et poignantes nappes sibyllines, de même que de confortables et intrigantes ondes soniques embaumées d'éther qui chevauchent des rythmes aussi paresseux que ces fines modulations analogues qui nous transportaient au pays de la boucane bleue dans les années 70.

L'au-revoir des Elements exploite le sombre côté dramatique de Urvent, un peu comme Canopus d'ailleurs, avec des pulsations organiques qui gargouillent dans une horde de vents aux arômes abscons. Les modulations en font le charme. Elles rampent comme des âmes sur le dos du néant, valsant par moments assez maladroitement avec des vents agonisants et des brises d'éther qui soufflent les ambiances quasiment méphistophéliques d'un titre dont on imagine aisément des ombres sortir d'un cimetière par un soir de lune noire. Ambiant, très riche et surtout très efficace. Avec ses sabots qui claquent aux vents et palpitent comme un cœur au repos, Gienah présente une figure de rythme aussi abstraite que statique où les modulations d'une discrète ligne de basse sont plus animées que les pulsations des galoches. Teinté de ses vers soniques sibyllins, le synthé épouse ces mouvements ondulatoires et siffle des rêveuses roucoulades qui finissent par s'égarer en cris d'agonie dans un pattern sonique ambiosphérique nuancé par des hurlements de sirènes apocalyptiques. Et si nous pensions avoir été capté dans les filets des réminiscences Shulziennes dans Urvent c'est que nous n'avons pas entendu cette longue symphonie de nappes de synthé qui flottent avec des arômes d'éther qu'est Andromede. Nous sommes en pleine période Timewind avec ces vagues de synthé qui dérivent comme un banc de brume astrale dans un cosmos farci de ces tonalités intersidérales des années vintages. C'est à peine si elles ondulent. Et pourtant le rythme ambiant se nourrit de ces impulsions statiques qui se propagent comme des remous dans un lac trop petit, alors que la musicalité se présente avec des hymnes ambiants sous-jacents qui y flottent et fredonnent même des airs baroques. J'ai trouvé ça long à la première écoute. Mais une fois bien installé entre les coquilles de mes écouteurs, j'ai totalement succombé aux charmes obscurs de cette symphonie ambiante vintage. Après un Canopus qui, même si un peu plus ambiant, nous plonge dans les ambiances de Urvent, avec un côté aussi sombre mais plus dramatique, Alcyone propose une approche plus délirante avec des séquences qui piétinent comme des pas perdus dans des solos de synthé dont les torsades s'imbibent constamment de cette bruine psychédélique qui nourrit les ambiances de PARSEC. Un peu plus et on croirait entendre un titre perdu dans les travaux de Blackdance ou Picture Music de Klaus Schulze.

Faire constamment un parallèle entre les œuvres ambiantes charnières de Klaus Schulze et ce premier album de Kryfels n'est pas une forme de désaveu envers Richard Raffaillac. Il y a des artistes qui imitent et d'autres qui veulent exploiter à fond ces ambiances analogues que le temps nous a dérobé dans sa folle course pour arrêter son cadran. Et c'est exactement le cas avec cet album. Kryfels submerge littéralement l'auditeur dans un bain sonique aux agréables parfums des années psychédéliques vintages mais avec une vision, pour bâtir rythmes et ambiances, des années contemporaines. On sent l'emprise des œuvres à caractère analogue (Richard Raffaillac a construit brique par brique PARSEC à partir d’équipements analogues) dans une vision contemporaine qui fait un superbe lien entre les deux époques. C'est un album à posséder pour tous ceux qui se nourrissent de la discographie de Klaus Schulze, années Cyborg à Mirage.

Sylvain Lupari (26/07/14) *****

Disponible chez PWM Distrib

63 views0 comments

Recent Posts

See All
bottom of page